Les abayas à l’École, une atteinte à la laïcité ?

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Posté par : SOS Éducation - M 18 juin 2023 3 commentaires

Chère amie, Cher ami,

Voilà revenue la question des signes ostentatoires à l’École

C’est un nouveau marronnier !

De temps à autre, le sujet est remis sur le devant de la scène médiatique.

Et c’est le moment où chacun semble découvrir que des élèves portent le voile, l’abaya, le qami… dans l’École publique.

À chaque fois, c’est reparti pour un tour de tergiversations !

Car si le voile est « officiellement » interdit par la loi de 2004, qu’en est-il des abayas et des qamis ?

Porter ces tenues, est-ce un acte de prosélytisme religieux ou non ?

Je suis intervenue lundi dernier sur ce thème dans l’émission Parlons Vrai sur Sud Radio.

J’ai débattu avec deux autres invités : Céline Boulay-Espéronnier, sénatrice LR de Paris, et Abdeslam Hitache, militant EELV et de l’association Banlieue Plus.

Le patron d’émission, le journaliste Jean-Jacques Bourdin, animait l’échange.

J’ai pu expliquer la position de SOS Éducation sur la laïcité et sur le port de l’uniforme, et :

  • Apporter des données chiffrées,
  • Faire état des retours du terrain et de notre propre vécu,
  • Rappeler les principes de notre laïcité à la française,
  • Invoquer le nécessaire retour de l’autorité.

Puis j’ai insisté sur la promesse d’une École exigeante, digne d’un pays comme la France, qu’il nous faut tenir et respecter. C’est notre devoir.

La France a tant à offrir à tous les enfants. Mais qu’attendons nous !

SOS Éducation a pu, il me semble, présenter une analyse objective, sereine et argumentée de la question posée.

Cliquez simplement sur l’aperçu ci-dessous pour retrouver mon intervention complète sur le sujet.

Et si vous souhaitez aller plus loin, je vous invite à retrouver toutes les données chiffrées sur le sujet au bas de cet article.

Vous pouvez aussi voir la vidéo directement sur Youtube en cliquant sur ce lien.

Le ministre de l’Éducation nationale, Pap Ndiaye, lors de son intervention dans l’émission Dimanche en Politique sur France 3 en mai dernier, a tenu à être rassurant (retrouvez l’article à ce sujet ici).

Il a annoncé à qui voulait bien l’entendre que les atteintes à la laïcité à l’École publique sont très importantes à deux périodes de l’année :

  • Au moment de la commémoration de l’assassinat de Samuel Paty (+700 signalements en octobre 2022)
  • Au moment du Ramadan et de l’Aïd (+500 signalements en mars et +600 en avril 2023)

« Il y a toujours un pic en octobre, lié notamment à la commémoration de l’assassinat de Samuel Paty. Et puis il y a toujours une remontée, chaque année au moment du ramadan. » Voilà la formule du Ministre de l’Éducation nationale !

En d’autres termes, ne vous inquiétez pas, le mois d’après ça baisse

Sauf que ces données sont la PREUVE, s’il en fallait une, qu’il y a bien un lien entre le nombre de signalements et un prosélytisme délibéré de la part de certains élèves ou de leurs familles.

Le Ministre de l’Éducation nationale n’a pas fait ce lien.

Il est pourtant chargé de faire appliquer la loi et de faire respecter les valeurs de la République française (en premier lieu desquelles la laïcité !).

La laïcité, pourquoi ça bloque chez Pap Ndiaye…

Le principe de laïcité vise à favoriser le vivre-ensemble dans un cadre multiculturel, en rassemblant des enfants pratiquant des religions différentes.

Dans l’École, la laïcité permet de respecter les libertés fondamentales et les droits de chacun, dans le cadre défini de la liberté de conscience, d’expression et de pratique religieuse.

Mais voilà ! C’est justement  la singularité de notre modèle laïc français qui se distingue de la laïcité libérale pratiquée en Angleterre, aux États-Unis, et dans un certain nombre d’autres pays anglo-saxons…

C’est le problème avec Pap Ndiaye.

Notre ministre de l’Éducation nationale est un ministre américain en France !

Il pratique une laïcité à l’américaine, libérale, où toutes les communautés et toutes les minorités doivent être visibles. Ce n’est pas vraiment compatible avec l’universalisme français !

C’est la raison pour laquelle Pap Ndiaye est très mal à l’aise sur la question de la laïcité.

Il est incapable de prendre une décision, mais comment le pourrait-il ?

Il ne cesse de marquer son obsession à mettre en avant les minorités LGBTQI+. Il vient d’ailleurs de placarder un nouveau slogan on ne peut plus clair dans les établissements scolaires : « Ici on peut être soi ».

Un slogan digne de la marque de fast-food McDonald’s, qui a pour formule « Venez comme vous êtes ». Étonnante similitude, non ?

Il faut s’y résoudre : Pap Ndiaye pratique une laïcité à la McDonald’s.

Cette injonction faite par le ministre de l’Éducation nationale à tous les élèves de France est incompatible avec les principes de la laïcité à la française.

La laïcité française signifie discrétion.

La religion est une liberté qui s’exerce dans la sphère privée. Dans l’espace public, la religion se fait discrète et se pratique dans des espaces dédiés à son culte.

Le respect de la neutralité dans tous les services publics est LE principe fondamental de la laïcité à la française.

L’école publique est un espace de neutralité, nécessaire et obligatoire.

C’est pourquoi en France, un signe « ostentatoire » ou un acte religieux dans une institution publique sont caractérisés comme du prosélytisme, s’opposant à nos principes laïcs.

Les enfants d’abord

Il est important d’agir pour préserver la laïcité en France, et surtout à l’École !

Malheureusement, le manque de courage politique pour faire respecter notre laïcité met en danger les enfants et les équipes pédagogiques.

La question devrait être traitée sans détour.

L’École est devenue le terrain des querelles politiques, idéologiques, et religieuses.

La guerre des idées se fait désormais par l’École interposée. C’est inacceptable !

L’École est le territoire des enfants.

Toute notre attention doit être pour eux, pour leur instruction et leur protection.

D’ailleurs, de nombreuses familles de confession musulmane inscrivent leurs enfants dans des écoles privées.

Elles recherchent dans ces établissements la meilleure instruction laïque pour leurs enfants. C’est un comble !

Et bien sûr, ces enfants n’ont aucune difficulté à appliquer les règles fixées pour respecter le principe laïc de l’École française dans un établissement privé sous contrat de l’Éducation nationale.

À nouveau, de quoi méditer sur l’absurde de la situation…

L’École est un lieu magnifique d’émancipation par le savoir, et elle a le devoir de garantir à tout enfant scolarisé en France que la seule chose qui compte, c’est lui.

Sa personne, son engagement, ses efforts, son enthousiasme à apprendre !

Le reste est l’affaire des parents, qui ont fait le choix de l’École publique.

Sur cette base, réaffirmée, l’uniforme scolaire s’inscrit dans un projet de cohésion sociale et d’unité.

SOS Éducation y est favorable puisqu’il masque les inégalités sociales, fédère le groupe scolaire et est plus économe pour les familles.

Priorité à l’éducation !

signature sophie auduge

Sophie Audugé,
Déléguée Générale de SOS Éducation

P.S. : Pour un autre regard sur ce sujet, je vous recommande cet article intéressant sur le site de Marianne : https://www.marianne.net/agora/france-laique-regis-debray-ou-la-laicite-en-acte

P.P.S :  Vous le savez, l’administration fiscale refuse de reconnaître le caractère éducatif de nos travaux et activités.

Vous êtes les seuls à pouvoir nous permettre de continuer…

Si vous le pouvez, soutenez SOS Éducation financièrement : rendez-vous sur notre page de dons en ligne !

Retrouvez ci-après les données chiffrées que j’ai évoquées lors de l’émission, la source d’information et quelques éléments d’analyse détaillés.

Les chiffres sont issus de l’enquête menée par l’IFOP pour la revue Ecran de Veille, publiée le 09 décembre 2022 : Les enseignants face à l’expression du fait religieux à l’école et aux atteintes à la laïcité.

Retrouvez l’enquête complète ici.

Les résultats montrent que :

  • 52% des professeurs, quel que soit le type d’établissement (public ou privé sous contrat), se sont déjà autocensurés dans leur enseignement. C’est 9 % de plus qu’en 2020.
  • Dans l’Enseignement secondaire public, la part des professeurs qui s’autocensurent atteint 56%. C’est + 20% par rapport à 2018 ! Il y a eu un avant et un après Samuel Paty. Évidemment !
  • En Éducation prioritaire, les professeurs sont 65 % à s’être déjà auto censurés, soit 2/3 ! Là encore, la progression est une information en soi : + 18% par rapport à 2020 !
  • Un autre phénomène marquant concerne l’âge des professeurs. Les plus jeunes s’autocensurent davantage. Ils sont 60% des moins de 40 ans à s’autocensurer. C’est + 12 % par rapport à 2020.
  • Une autre donnée alarmante concerne l’élémentaire. Ce phénomène d’autocensure s’observe dès le primaire et concerne désormais près d’1 enseignant sur 2. C’est +10% par rapport à 2020.
  • Autre constat qui paraît fou, hors des cours (couloirs, cantines…), 70% des professeurs ont observé une atteinte à la laïcité depuis l’instauration de la loi en 2004.

Spécifiquement sur le port d’abayas ou de qamis :

  • Plus d’un professeur sur 4 a observé le port d’une abaya ou d’un qamis depuis l’interdiction des signes ostentatoires en 2004
  • Dans les lycées du secteur public, c’est un professeur sur 2 qui a été témoin du port d’une de ces tenues.

Mais ce qui est le plus inquiétant, c’est la désinvolture qui accompagne ce phénomène d’entrisme du religieux dans l’école laïque française.

Le point de vue des professeurs :

  • Près d’un professeur sur 2 (47%) reconnait ne pas avoir signalé à l’administration le port de signes religieux pourtant observé.
  • Plus inquiétant encore, seulement 68% des professeurs considèrent que ces signes religieux n’ont pas leur place à l’École ! Les autres, un professeur sur 3 tout de même, ne sont donc pas disposés à faire respecter la loi de 2004.
  • Certains ne se prononcent pas (17%), d’autres (15%) considèrent que ces tenues sont culturelles et non pas religieuses/cultuelles.

Concernant l’assassinat de Samuel Paty :

  • Près d’un professeur sur 2 a peur d’aborder les motifs de l’assassinat de Samul Paty…
  • Et seulement 6 professeurs sur 10 ont rendu un temps d’hommage à Samuel Paty en octobre dernier. À méditer…

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3 commentaires

  • Chartiot

    Bonjour, je soutiens sans réserve vos positions et vos revendications, c’est une honte que SOS ÉDUCATION ne soit pas reconnue d’utilité publique et que le pouvoir cherche à vous détruire.
    Ce qui motive ce message est cette phrase:
    “Le principe de laïcité vise à favoriser le vivre-ensemble dans un cadre multiculturel, en rassemblant des enfants pratiquant des religions différentes.” Je ne suis pas d’accord avec vous car vous oubliez que les croyants toutes religions confondues sont minoritaires car ce sont les non-croyants, les athées et autres agnostiques qui sont largement majoritaires…
    Le principe de laïcité, pour le dire autrement, vise donc à fiche la paix à la majorité!
    Je pense que vous gagneriez à vous appuyer sur cette majorité qui n’embête personne avec ses convictions… votre phrase pourrait alors devenir:
    “Le principe de laïcité vise à favoriser la paix sociale entre des groupes sociaux aux croyances diverses très minoritaires au sein d’une société pacifique qui n’a pas de croyance.”

  • Sablayrolles

    Je vous suis TOTALEMENT………

  • ABAMELIKOFF

    Les élèves catholiques portent-ils une croix dans l’école publique? Est-ce autorisé ? Se sont-ils fait agresser par d’autres élèves ou ont-ils été réprimandés par leur professeur ?