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Posté par : SOS Éducation - J 8 décembre 2020 Aucun commentaire

Notre lettre
au Président de la République…

Chère amie, Cher ami,

Les choses commencent à bouger !

Le projet de la loi confortant les principes républicains a été présenté en Conseil des ministres. Il va maintenant être soumis au vote des parlementaires.

Le texte a légèrement évolué, mais le fond reste inchangé. En réalité, la seule modification concerne l’interdiction de l’instruction en famille. Par un habile tour de passe-passe juridique, le caractère inconstitutionnel de l’interdiction d’instruire en famille est contourné… par l’obligation d’une demande dérogatoire fortement sous contrainte et aléatoire : périodicité annuelle, décision locale, cadre très restrictif.

L’équipe de SOS Éducation a lu de nombreux documents et études, analysé l’ensemble de vos témoignages, et parlé avec de nombreux acteurs du monde de l’Éducation, des historiens, des spécialistes…

La position de l’Association s’affine :

  1. La liberté d’instruction est un principe fondamental de notre démocratie et de notre constitution.
  2. La liberté d’instruction reconnaît le droit aux parents de choisir le mode d’instruction qui convient le mieux à leurs enfants, dans le respect du socle commun édicté par l’Éducation nationale et des valeurs de notre République.
  3. La liberté d’instruction est une et indivisible. Qui s’attaque à l’instruction en famille, s’attaque à l’école privée sous contrat comme à l’école libre hors contrat.

La position de l’association n’est pas de défendre l’instruction en famille comme étant un modèle meilleur qu’un autre. Le combat qu’engage SOS Éducation est celui de la défense de la liberté d’instruction. C’est pour cela que SOS Éducation a écrit au Président de la République et lui a communiqué 108 commentaires représentatifs parmi les 1 300 que vous nous avez adressés.

Dans ce courrier, l’Association témoigne de la nécessité de protéger nos libertés fondamentales, en premier lieu celle du libre choix d’instruction.

SOS Éducation s’engage à soutenir toutes les mesures efficaces pour lutter contre les séparatismes.
Notamment le renforcement des mesures d’identification des structures d’enseignement clandestines, et l’application sur tout le territoire de l’arsenal législatif existant et des contrôles réguliers associés.
Mais aussi, l’Association rappelle que l’Éducation nationale est la première concernée, en son sein, par la montée des séparatismes.

SOS Éducation alerte également le Président de la République sur l’école obligatoire à 3 ans alors que notre système éducatif ne s’est pas doté des moyens de formation et d’encadrement nécessaires aux spécificités de l’instruction de la petite enfance.

De même, au moment où le projet de loi était présenté en Conseil des ministres, la France recevait son énième bonnet d’âne : dernière en maths des pays de l’Union Européenne pour le CM1, derrière l’Albanie et l’Arménie… (étude Timss 2019).

Notre école républicaine va mal, très mal. Le niveau s’effondre, dans toutes les matières. Nos profs ont peur et pleurent cette école qui va de mal en pis.

Qu’on ne se méprenne pas, notre action vise aussi à défendre l’École de la République, gratuite et laïque, qui doit absolument être réformée pour retrouver ses lettres de noblesse et redevenir le formidable ascenseur social qu’elle était autrefois.

Toute action contre la liberté d’instruction est un déni de ce constat d’échec et un refus de réformer l’Éducation nationale.

Pour SOS Éducation, une mobilisation massive et beaucoup de pédagogie sont nécessaires pour expliquer les enjeux cruciaux qui se cachent réellement derrière ce projet de loi.

Je vous invite à découvrir ci-dessous le courrier porté par coursier le 11 décembre au Président de la République, ainsi qu’au Ministre de l’Éducation nationale.

Je vous transmettrai demain le document qui présente 108 commentaires et avis représentatifs parmi les 1 300 que vous nous avez adressés.

Le courrier ainsi que vos commentaires sont également envoyés à l’ensemble des parlementaires.

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Monsieur le Président de la République
Emmanuel MACRON

Palais de l’Élysée
55 rue du Faubourg-Saint-Honoré
75008 Paris

Paris, le 11 décembre 2020

Objet : l’avis de citoyens sur l’interdiction de l’instruction en famille

Monsieur le Président de la République,
Monsieur le Ministre de l’Éducation nationale, de la Jeunesse et des Sports,

Le volet Éducation du projet de loi confortant les principes républicains, présenté le 09 décembre 2020 en Conseil des ministres, bafoue la liberté d’instruction, qui est pourtant une liberté fondamentale, indivisible, chère à notre pays.

Une telle restriction de nos droits ne peut se justifier qu’en proportionnalité d’un danger imminent et avéré.

Or aucune donnée sérieuse ne permet de démontrer un lien entre l’instruction en famille et un risque de radicalisation.

Bien au contraire, le rapport du Sénat “Radicalisation islamiste : faire face et lutter ensemble” démontre que “le phénomène de remise en cause de la laïcité et des valeurs de la République à l’école républicaine est ancien et demeure élevé, que le premier degré est particulièrement touché, et que les personnels de l’Éducation nationale sont à l’origine de 14 % des signalements pour atteinte à la laïcité et aux valeurs de la République”.

C’est bien l’école de la République qui est la première touchée par la radicalisation : perturbations sur la vie de l’école, contestations sur le contenu des enseignements, atteintes au principe de laïcité (prosélytisme, port de signes religieux).

Le développement de l’instruction libre ces dernières années n’en est pas la cause, mais la conséquence.

C’est la manifestation d’une défiance des parents envers l’École de la République qui ne parvient pas à se réformer, dont le niveau des élèves ne cesse de baisser et qui ne parvient pas à lutter contre l’augmentation des faits de violence en milieu scolaire.

Si l’obligation d’instruction à 3 ans est un bénéfice pour les enfants de familles allophones, l’obligation de scolarité à cet âge pour tous les enfants est massivement rejetée.

Aucun autre pays d’Europe n’impose à l’ensemble des enfants une scolarité obligatoire dès 3 ans, même ceux qui ont mis en place une politique éducative pré-primaire exemplaire en matière de formation des enseignants et de taux d’encadrement : deux éléments clefs d’une instruction publique efficace dès la petite enfance.

L’interdiction de l’instruction en famille – sous la forme qui vient d’être proposée – ne résoudra pas les problèmes de séparatisme. Par contre, elle braquera les familles qui instruisent consciencieusement leurs enfants dans le respect des exigences académiques fixées par l’Éducation nationale, et des valeurs républicaines.

Seule une stratégie de lutte sans relâche contre les structures d’enseignement clandestines protégera les enfants.

3 mesures par contre sont essentielles :

  1. Identifier les enfants qui passent à travers les mailles du filet.
  2. Renforcer les contrôles par les agents territoriaux et le corps d’inspection pour repérer les structures d’enseignement clandestines, les dérives sectaires, les risques de radicalisation.
  3. Appliquer le cadre législatif pour tous et sur tout le territoire.

Dans cette période de tensions, où le sentiment de restriction des libertés est exacerbé, interdire (ou très fortement limiter) l’instruction en famille est indéniablement une mesure :

  • Anticonstitutionnelle, puisque la liberté d’instruction et d’enseignement est une et indivisible dans notre démocratie.
  • Contraire à l’intérêt de l’enfant, puisque nous n’avons pas de véritable politique éducative pré-primaire (ce qui est incompatible avec une obligation de scolarisation à 3 ans cf. Regards sur l’Éducation 2016 – OCDE), et que notre école ne parvient toujours pas à intégrer les enfants aux besoins éducatifs particuliers (rapport Balanant comprendre et combattre le harcèlement scolaire).
  • Injuste et disproportionnée, puisqu’elle prive d’un droit fondamental des familles qui respectent les lois (donc innocentes de ce délit de séparatisme), et qu’elle n’empêchera pas les familles qui rejettent les valeurs de la République d’agir contre la loi.
  • Inégalitaire, car certains enfants auront accès à l’instruction en famille, d’autres non ; certains parents auront les moyens de scolariser leurs enfants dans des écoles privées, d’autres non.
  • Coûteuse pour les finances publiques : réintégrer de force des dizaines de milliers d’élèves, contre la volonté de leurs parents, dans des établissements déjà surchargés… est bien plus coûteux que de faire respecter la loi existante et de renforcer les mesures de contrôle et de fermeture des structures d’enseignement clandestines.

Maintenir une position idéologique contre l’instruction en famille ne fera qu’attiser les relations déjà tendues entre les parents, l’institution scolaire et l’État. Le niveau de mécontentement que nous percevons, notamment par les remontées des membres de SOS Éducation, est élevé. Une mobilisation massive, dans les rues, en cas de passage en force n’est pas à exclure.

Vous souhaitez gouverner en mobilisant l’intelligence collective. Restreindre la liberté d’instruction privera notre pays d’un laboratoire d’innovations et de pratiques pédagogiques individualisées, indispensables à l’inclusion de tous les enfants, et utiles à l’ensemble du système éducatif.

N’oubliez pas que 50 % des élèves instruits en famille le sont pour une année seulement. L’instruction en famille est souvent une passerelle nécessaire à l’enfant vers sa rescolarisation, et permet in fine l’inclusion scolaire pour beaucoup d’enfants.

Recevez en appui de ce courrier 108 commentaires de parents, enseignants et grands-parents parmi les 1 300 envoyés par les membres de SOS Éducation. Tous témoignent avec sincérité et justesse de leur attachement à la liberté d’instruction dans le respect des valeurs républicaines.

Nous vous demandons solennellement, Monsieur le Président de la République, Monsieur le Ministre de l’Éducation nationale, de la Jeunesse et des Sports :

– de restituer pleinement la liberté de choix d’instruction aux parents respectueux des valeurs de la République et donc de ne pas interdire l’instruction en famille, ni la soumettre à un régime d’autorisation.

– de mener la lutte contre les structures d’enseignement clandestines, main dans la main avec les associations qui défendent la liberté d’instruction dans le respect des valeurs et des principes républicains.

Nous nous tenons à votre disposition pour travailler ensemble sur ce sujet dans l’intérêt supérieur de l’enfant, de la société et de la République.

Nous vous prions de croire, Monsieur le Président de la République, Monsieur le ministre de l’Éducation nationale, de la Jeunesse et des Sports, en l’assurance de notre considération distinguée.

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Priorité à l’éducation !

signature sophie auduge

Sophie Audugé,
Déléguée Générale de SOS Éducation

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